Un roi sans château !

Nous sommes en France, au XVIIe siècle, à l'apogée du pouvoir royal, qui deviendra absolu. En pleine guerre de Trente Ans, à la veille d’un royaume de France puissant rayonnant sur une grande partie de l'Europe ; règne le roi Louis XIII, dit « le Juste », fils d'Henri IV et de Marie de Médicis. Né le 27 septembre 1601 au château de Fontainebleau et mort le 14 mai 1643 au château de Carrouges ; Louis XIII est roi de France et de Navarre de 1610 à 1643. De son mariage avec l'infante Anne d'Autriche, il a tardivement deux fils : le futur Louis XIV, et Philippe, duc d'Anjou fondateur de la maison Orléans. La naissance tardive de son premier fils est considérée par le couple comme « un don du Ciel », et amène le roi à signer le Vœu de Louis XIII (consacrant le royaume de France à la Vierge Marie), avant même la naissance de l'enfant. Pour fêter dignement cet heureux évènement, Louis XIII décida d’offrir à la mère de son futur héritier un nouveau château, Fontainebleau manquant d’espace et de charisme pour un roi digne de ce nom.

 

Louis XIII et le Cardinal de Richelieu lancent le Royaume de France dans la « Guerre Ouverte » contre la Maison d’Autriche et l’Espagne en 1635. La guerre de Trente Ans est une série de conflits armés qui a déchiré l’Europe du 23 mai 1618 au 15 mai 1648. Les causes en sont multiples, mais son déclencheur est la révolte des sujets tchèques protestants de la maison de Habsbourg, la répression qui s'ensuivit, et le désir des Habsbourg d’accroître leur hégémonie et celle de la religion catholique dans le Saint-Empire. Depuis le début de la guerre, la France s’était toujours soigneusement tenue à l’écart des combats tout en appuyant depuis 1625 les opposants à l’Empereur et au roi d’Espagne par sa diplomatie et ses subsides. Ses seules implications directes se sont exercées dans des zones périphériques. La période française durant cette guerre s’étalera de 1635 à 1648.

 

C’est à son plus fidèle garde du corps, moi, chevalier Nicolas de Harfleur dit « le vadrouilleur » qu’est confié la mission de trouver le nouveau logis royal.

 

Je décide de partir en quête de ces murs accompagné de mes deux plus vieux compagnons sur notre chariote à trois roues tirée, que dis-je propulsée par de nombreux et puissants canassons. Louis XIII me confia ses deux meilleurs éclaireurs, Googulin de Maps et Via de Michelin, pour nous aider à remplir cette mission et partir dans la bonne direction.

 

C’est de bon matin, chargés de victuailles et de matériels que nous quittons notre humble logis.

 

Après une journée entière le long de voies et de routes à l’état déplorable consécutivement aux guerres civiles du siècle précédent et à l’absence d’une administration dédiée à la gestion, l’entretien et la construction ; Googulin de Maps et Via de Michelin nous conduisent au petit village de la Roche-Posay. Nous ne trouvons malheureusement ici qu’un donjon, daté du XIIe siècle au vu de son architecture. Informés par les paysans et autres gueux du coin que plusieurs châteaux se répartissent les terres locales ; nous décidons d’installer notre campement pour quelques jours à Mousseaux, non loin de la Roche-Posay, chez de sympathiques villageois, fort aimables et accueillants.

 

Après quelques recherches fructueuses, Googulin de Maps nous indique qu’à quelques roues de là se dresse une forteresse.

 

L'impressionnante Forteresse d'Angles-sur-l'Anglin du XIe siècle s'élève à plus de 40 mètres au-dessus des eaux de l’Anglin. Fièrement dressée sur son promontoire rocheux elle semble, encore aujourd’hui, défendre la ville. De sa vie tourmentée, il ne reste aujourd’hui que de majestueuses ruines et une atmosphère unique…  Nous devons continuer à prospecter.

Cédric Fabien de Hechard, fils et petit-fils de sellier nous sera d’une grande aide pour les menues réparations de notre chariote malmenée sur les voies que nous fait parfois empreinte Via de Michelin, pourtant sujet loyal du roi Louis XIII. Il y consacrera presque une journée permettant ainsi à Googulin de Maps de repérer Chauvigny, ces trois châteaux, son donjon et sa tour ; ainsi que le château du Bouchet en Brenne.

Occupant l'extrémité du promontoire de la ville haute, le premier château, le château baronnial à Chauvigny s'étend sur un périmètre de 230 mètres. Le second, le Château d'Harcourt tire son nom de l'illustre famille normande d'Harcourt. Resté près de deux siècles en possession de la famille d'Harcourt, il a été racheté au XVe siècle par les évêques de Poitiers. Construit à la fin du XIIe siècle, c'est le mieux conservé des châteaux chauvinois. Le donjon rectangulaire du XIIe siècle, à contreforts plats, fut réaménagé au XIVe siècle. Au rez-de-chaussée se trouve une prison voûtée. Il ne reste du château de Montléon, le troisième, que des vestiges épars, noyés dans des constructions plus récentes. Il est situé à proximité immédiate de la collégiale Saint-Pierre, construite au XIIe siècle, l’un des fleurons du Poitou Roman. D'une enceinte peu étendue, dont quelques bases subsistent, émerge la haute et massive silhouette du donjon de Gouzon, que l'on aperçoit de toutes parts, en approchant de Chauvigny. Il a été édifié en plusieurs fois. La tour de Flins domine les escarpements de la vallée du Talbat et s'incorpore aux fortifications de la ville de ce côté. Ce petit donjon rectangulaire possède des angles renforcés par des contreforts

En chemin vers le château du Boucher, nous traverserons la ménagerie de Beauval, un établissement historique pour maintenir et présenter des animaux domestiqués, sauvages et exotiques ; en captivité sous garde humaine.

L’origine de la construction du château du Bouchet est inconnue, mais une pièce gallo-romaine a été trouvée à proximité de l’édifice lors de fouilles. Celle-ci laisse supposer qu’il y a eu là, très tôt, une habitation. À l’origine, le château est une ancienne forteresse médiévale construite sur une butte rocheuse de grès rouge, typique du territoire de la Brenne. Celui-ci adopte un plan circulaire protégé par de nombreuses tours dominant des douves sèches. Sa situation dominante en fait un emplacement défensif et un observatoire majeur en cas d’agressions ennemies. Sa situation lui vaut le nom initial de « Bosquet » transformé plus tardivement en « Bouchet ». Le premier propriétaire identifié est le seigneur Guy Sénebaud, au XIIe siècle, il était le compagnon d’armes de Philippe-Auguste. Même s’il semble en bon état, le château du Bouchet n’est pas digne de mon roi.

Il est temps de constater que notre quête est vaine et que l’heure du retour a sonné.

 

Comme un dernier espoir, Googulin de Maps et Via de Michelin nous conduisent à Domfront et son château. Le château de Domfront bâti sur un éperon de grès armoricain forme un site de défense remarquable. Les vestiges visibles et malheureusement là encore uniquement des vestiges (donjon et chapelle) datent de la fin du XIe siècle. Le rempart est doté d'une courtine à gaine percée d'archères remarquablement conservée. Dressée sur son éperon rocheux, Domfront, une petite cité de caractères joue les vigies sur un horizon bocager.

Nous logerons pour une nuit dans l’étable, vaste et chaleureuse d’un autochtone de Flers, Ibissien Stylus, amateur visiblement de pommes ; et qui nous indiquera la présence d’un château non loin.

 

Autrefois appelé le « Château d’en-bas » en raison de sa position en bas du village de Flers, le Château de Flers a été construit en 1661 à l’emplacement de l’ancien logis des Seigneurs de Flers. Sa construction en briques et en pierre ainsi que ses pignons « en pas de moineau » le rendent caractéristique de l’architecture flamande. Devenu ferme au XIXe siècle, il a été entièrement restauré entre 1986 et 1991. Aujourd’hui siège de l’office de tourisme, il abrite également divers services municipaux et le musée archéologique où vous pourrez découvrir une partie de l’histoire de la ville. Ce n’est en rien une habitation pour un roi.

C’est malheureusement porteur de mauvaises nouvelles que nous allons rentrer au royaume. Louis XIII, impatient de découvrir le fruit de nos recherches va probablement être désappointé.

 

Un roi sans château !

 

Alors que Via de Michelin nous annonce les derniers kilomètres qui nous sépare de notre destination finale ; là, au beau milieu du bocage normand, en pays d’auge, le château de Carrouges se dresse fièrement devant nous.

 

Carrouges est d'abord au XIVe siècle une place forte de la guerre de Cent Ans (donjon). Il devient un logis seigneurial au XVe siècle (aile Blosset), augmenté au XVIe siècle d'un châtelet d'entrée considéré comme le premier témoin de l'architecture de la Renaissance en Normandie. De nouveau fortifié au temps des guerres de Religion (bastion ouest), sa fonction de demeure de prestige s'affirme par la construction à la fin du XVIe siècle de deux ailes « classiques » et des escaliers qui les desservent dus à l'architecte François Gabriel. Les seigneurs de Carrouges reçoivent le roi Louis XI en 1473 puis Catherine de Médicis, membre de la famille de Marie de Médicis, mère de notre roi Louis XIII. Une providence !

Le somptueux château de Carrouges sera grâce à moi, Nicolas de Harfleur, le château qui verra naître le futur Louis XIV et « Bip Bip… » Philippe, duc « Bip Bip Bip… » d’Anjou « Bip Bip Bip Bip… »…

 

Il est 6 h 30, nous sommes mardi matin. J’ouvre les yeux après une bonne nuit triomphale. Les vacances sont terminées.

 

Il est temps de reprendre les bonnes vieilles habitudes et de retourner au boulot !

 

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